À quel point du chemin sommes-nous?
Nous sommes tous comme des voyageurs qui ont pour but la cité sainte. Que chacun sache en quel état et où il se trouve
Nous sommes tous, comme des voyageurs qui ont pour but la cité sainte. Sortis d'une même ville, les uns ont fait cinq milles, puis se sont arrêtés ; d'autres en ont parcouru dix ; certains sont allés jusqu'à la moitié de la route ; d'autres n'ont pas fait un pas : sortis de la ville, ils sont restés aux portes, dans son atmosphère nauséabonde. Il arrive aussi que certains fassent deux milles, puis s'égarent et reviennent sur leurs pas, ou ayant fait deux milles, ils reculent de cinq. Il en est encore qui ont marché jusqu'à la cité même, mais sont restés dehors et n'ont pas pénétré à l'intérieur.
Voilà bien ce que nous sommes. Il en est assurément parmi nous qui avaient pour but l'acquisition des vertus, quand ils ont quitté le monde pour entrer au monastère. De ceux-là, les uns ont progressé un peu, puis se sont arrêtés ; d'autres ont avancé un peu plus, certains ont même fait la moitié du trajet, et ils en sont restés là. Il y en a qui n'ont rien fait du tout : ils ont paru quitter le monde ; en fait, ils sont restés dans les choses du monde, dans ses passions et sa puanteur. Certains réalisent un peu de bien, puis le détruisent, ou même ils en détruisent plus qu'ils n'en ont fait. D'autres ont acquis les vertus, mais ils ont eu de l'orgueil et du mépris pour le prochain : ils sont demeurés à l'extérieur de la cité et n'y ont point pénétré ; ceux-là non plus n'ont pas atteint leur but, car bien qu'ils soient parvenus jusqu'à la porte de la cité, ils sont restés dehors, en sorte qu'eux aussi ont manqué leur but. Que chacun de nous apprenne donc où il en est ... Que chacun sache en quel état et où il se trouve.
Dorothée de Gaza, Instructions X,107